Le Pays De France - Corse: après une nuit d'"émeutes", manifestations dans le calme à Ajaccio

Paris -
Corse: après une nuit d'"émeutes", manifestations dans le calme à Ajaccio
Corse: après une nuit d'"émeutes", manifestations dans le calme à Ajaccio

Corse: après une nuit d'"émeutes", manifestations dans le calme à Ajaccio

Plusieurs centaines de lycéens ont manifesté jeudi matin près de la préfecture d'Ajaccio, au lendemain d'une nuit "d'émeutes" qui a vu le palais de justice pris pour cible et plusieurs personnes blessées, huit jours après l'agression en prison du militant indépendantiste Yvan Colonna.

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Environ 400 lycéens se sont rassemblés en fin de matinée derrière une banderole "Per Yvan, Statu francesu assassinu" (Pour Yvan, Etat français assassin: NDLR), certains, visages masqués, prêts à en découdre avec les forces de l'ordre mais une dizaine d'adultes se sont interposés, parvenant à empêcher les heurts, a constaté une journaliste de l'AFP. A 16H00, un calme précaire régnait à proximité de la préfecture.

Depuis qu'Yvan Colonna, condamné à la perpétuité pour l'assassinat du préfet de Corse Claude Erignac en 1998, est dans le coma, après avoir été agressé le 2 mars par un codétenu emprisonné pour terrorisme, les manifestations se sont multipliées en Corse à l'appel d'étudiants, de lycéens, d'organisations nationalistes ou de syndicats.

"Les lycéens se mobilisent pour une certaine idée de la justice, qu'ils considèrent bafouée, on ne peut que les soutenir, mais par contre, on ne peut pas soutenir les débordements", a témoigné auprès de l'AFP France Battini, 52 ans, professeure d'anglais au lycée Fesch d'Ajaccio qui a tenté de calmer les jeunes.

"On a été quelques-unes, enseignantes, mères de famille, à se mettre devant la banderole pour éviter autant que possible que cela dégénère comme hier soir", a-t-elle poursuivi.

Dans la nuit de mercredi à jeudi, la colère est montée d'un cran, avec des heurts violents entre certains protestataires et les forces de l'ordre à Ajaccio, Calvi (Haute-Corse) ou encore Bastia. Au moins 14 personnes ont été blessées à Ajaccio, 23 CRS et trois civils à Bastia, selon les préfectures.

Pour plusieurs observateurs parmi lesquels le politologue Thierry Dominici, les mouvances indépendantistes plus dures sont désormais à la manoeuvre dans ces manifestations qui tournent aux émeutes.

- "Surenchère dans la violence" -

"On a subi deux assauts hier contre le tribunal", dont un "où à priori une quinzaine d'individus sont entrés dans le bâtiment et ont incendié le rez-de-chaussée, la salle des pas perdus, dégradé du mobilier, de l'informatique et des vitres", a décrit à l'AFP Nicolas Septe, procureur de la République d'Ajaccio, en parlant "d'émeutes".

Les syndicats de magistrats ont exprimé jeudi leur "soutien aux magistrats et fonctionnaires du tribunal d'Ajaccio" de même que les chefs de cour à Bastia.

Certains manifestants, équipés d'une mini-pelle mécanique, ont également dégradé une agence du Crédit Agricole d'Ajaccio avant de se diriger sur la place Claude Erignac, lieu hautement symbolique, où plusieurs personnes se sont interposées pour éviter toute déprédation. Jeudi, la caisse régionale du Crédit agricole a fait part à l'AFP de "sa tristesse face à ces dégâts", rappelant que la banque est "entièrement au service du territoire et des Corses".

Cinq interpellations ont eu lieu, a précisé le procureur, qui "appelle évidemment à l'apaisement général", regrettant "une surenchère dans la violence (...) du côté des manifestants".

Yvan Colonna, emprisonné à Arles (Bouches-du-Rhône), demandait de longue date son rapprochement en Corse, ce qui lui avait systématiquement été refusé en raison de son statut de "détenu particulièrement signalé" (DPS).

Le Premier ministre Jean Castex a levé ce statut mardi, une décision jugée par beaucoup comme une provocation, Yvan Colonna se trouvant désormais entre la vie et la mort dans un hôpital de Marseille.

"La seule chose à mon sens qui apaiserait, c'est de lever le statut DPS d'Alain Ferrandi et de Pierre Alessandri. L'avoir fait pour Yvan Colonna, c'est presque de l'indécence vu son état", a estimé Mme Battini.

Pour les deux autres détenus "le Premier ministre aura à se prononcer prochainement", a indiqué mercredi le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal.

(R.Lavigne--LPdF)