La Cour des comptes dresse un bilan contrasté de la lutte contre la fraude fiscale
La fraude fiscale demeure un phénomène mal chiffré, peu connu, et les statistiques pénales montrent qu'elle n'est ni plus fréquemment, ni plus sévèrement sanctionnée qu'il y a 10 ans, selon un rapport de la Cour des comptes publié mardi.
La Cour s'est penchée sur la politique de lutte contre la fraude fiscale pour en dresser un bilan contrasté et sévère sur certains points.
La principale conclusion est connue: il s'agit d'un phénomène "mal cerné, mal chiffré, mal traité, et souvent confondu avec l'évasion ou l'optimisation fiscale" et son "niveau global est méconnu", a résumé Pierre Moscovici, premier président de la Cour devant la presse.
Mais le rapport ne livre pas "le chiffre magique", a prévenu M. Moscovici, et recommande que l'administration achève le chiffrage de l'écart fiscal d'ici 2027, un concept que la Cour juge "plus neutre", et qui inclut non seulement la fraude fiscale mais aussi les erreurs commises de bonne foi par les contribuables ainsi que les aléas du recouvrement des impôts.
Si l'administration dispose de plus de moyens pour détecter la fraude fiscale, la Cour observe que les recettes obtenues grâce au contrôle fiscal ne progressent pas depuis une dizaine d'années.
Tandis que l'ensemble des recettes fiscales a augmenté de 44% depuis 10 ans, les résultats du contrôle restent relativement stables sur la même période, soit 21,2 milliards d'euros en 2015 et 20,1 milliards d'euros en 2024.
Le montant réellement recouvré par le fisc est inférieur d'environ la moitié: 11,4 milliards d'euros en 2025, contre 12,2 milliards d'euros en 2015.
La France accuse par ailleurs un retard dans l'estimation du montant de la fraude fiscale par rapport à d'autres pays.
Ainsi en 2024, 30% des 58 administrations fiscales de l'OCDE ont publié régulièrement des estimations de leurs écarts fiscaux, note la Cour, qui regrette l'insuffisance des moyens mis en oeuvre pour combler cette carence.
Il est "essentiel" que le fisc achève le chiffrage de l'écart fiscal d'ici 2027, ce que la Cour recommande depuis 2019, a affirmé Pierre Moscovici: sur l'impôt sur le revenu, l'impôt sur les sociétés, la TVA.
Une nécessité afin que le débat public ne demeure pas "pollué par des fantasmes", a-t-il encore estimé.
(N.Lambert--LPdF)